Athina Aerys ~

Athina est née dans la demeure familiale, non loin de Lackness. Ce n'était qu'une modeste maison blanche avec des tuiles rouges accolée à un moulin à eau mais la jeune fille s'y sentait à l'abri. Les parents d'Athina n'étaient pas riches, pourtant ils parvenaient à vivre grâce au commerce de leurs étoffes : c'était une famille de tisserands, qui aspiraient à avoir un enfant au meilleur rythme de vie qu'ils avaient pu avoir. C'est pourquoi ils travaillaient dur pour offrir à leur fille unique les meilleurs précepteurs qu'ils pouvaient s'offrir afin d'en faire une jeune fille instruite, lui donner de meilleurs chances dans la vie qu'eux avaient pu avoir. Très souvent le soir, pour aider sa fille à s'endormir, la mère de famille la berçait avec des contes enjôleurs et cette dernière buvait ses paroles paisiblement. Sans s'en rendre compte, les ambitions de ses parents s'encraient dans sa mémoire comme une petite éponge. Ce n'était pas méchant, ils étaient bienveillants, les Aerys. Très doux, très aimants avec leur unique enfant. Mais ils étaient ambitieux, ils espéraient qu'elle deviendrait une belle jeune femme, docile et érudite qui pourrait séduire un homme de bonne famille. Oui. L'enfance de la jeune femme fut pleine d'amour et de rêves de grandeur.

Difficile de s'extirper de l'influence de ses parents, et pourtant la jeune Athina trouva refuge dans la forêt. Elle était devenu une enfant disciplinée, elle écoutait d'une oreille lasse les énièmes revendications de sa mère pour se trouver un bon parti. Pourtant, dès qu'ils avaient le dos tourné, la jeune femme traversait le petit pont non loin de la maison et s'aventurait dans la forêt avec son ami, le fils du voisin. Il lui apprit à peu près tout ce que l'on peut apprendre à cet age là. Il lui apprit à tirer à l'arc, il lui apprit à viser, à savoir reconnaître les traces animales. Il lui apprit à embrasser, à aimer, il lui apprit à faire l'amour. Son âge grandissant, elle prenait en assurance et en autonomie bien que les paroles de ses parents ne pouvaient que la formater bien malgré elle. Bientôt, elle commença à rêver à un homme beau, important et bien placé dans la société. N'était ce pas le souhait de la plupart des jeunes filles après tout ?

A seize ans, la jeune femme était devenu des plus désirables. Sa petite taille la rendait délicate aux yeux des gens, et on pouvait dire qu'elle en jouait à cette époque là. Jeune et naïve jeune femme, douce Athina. C'est à cet âge là qu'elle le rencontra. Lui. Un bel homme, vraiment très bel homme. Plus âgé qu'elle, mais elle s'en fichait pas mal. Il faisait parti de la Garde de Saphir, ce qui ne manqua pas d'attiser un peu plus la convoitise d'Athina. Elle était une femme bien différente, à l'époque. Lorsqu'elle y repense, elle se demande encore comment elle avait pu être aussi superficielle. Pourtant, elle le convoita. Elle le convoita comme on peut convoiter un saphir, quelque chose de valeur qui attire l'oeil et qui rend important. Elle le courtisa, et bien entendu elle fini par parvenir à ses fins. Elle avait beau être jeune, elle savait ce qu'elle voulait. Il lui fit également la cour, probablement flatté de recevoir une attention aussi évidente de la part d'une jeune femme à marier. La passion commença entre ces deux là, rapidement. On ne peut pas dire qu'il la rendait indifférente, le beau Lothaire. Il savait y faire avec les femmes, il savait comment lui parler, il savait comment la toucher. Si c'est sa position sociale qui avait attiré Athina en premier lieu, elle se laissa séduire, elle se laissa plonger dans une chaude passion. Et puis quelques années plus tard, elle se laissa épouser. C'était le rêve de ses parents qui se réalisait, après tout. C'était le sien, également, bien sûr, à demi mot. L'ascension sociale que chaque enfant issu de famille modeste ne peut qu'espérer.

Lorsque le feu de la passion brûle et consume tout de l'intérieur, il ne reste par la suite plus que des cendres. Et quelles cendres... Oh, certes, durant plusieurs années Lothaire a été un époux exemplaire. Il ne manquait jamais une occasion de gater sa bien aimée, de lui montrer son amour et il ne cessait de l'exhiber fièrement. Pourtant Athina se lassa très vite de tout cela. Peut être est ce pour cela que tout dérapa de manière aussi brutale ? Elle se pose encore la question... Etait ce sa faute ? Avait elle commis un impair ? C'était une nuit paisible que cela arriva pour la première fois. Paisible, oui... Un doux soir d'été. On imagine toujours que les malheurs ne peuvent arriver que par jours pluvieux, n'est ce pas ? Une douce soirée. Lothaire était rentré saoul ce soir là. Las de faire semblant, Athina ne manqua pas de lui faire remarquer son agacement. Ce fut la première fois qu'il leva la main sur elle. Une gifle qui la laissa sans voix. Mi effrayée, mi surprise. Elle lui pardonna, mettant cela sur le compte de la boisson. Pourtant ce geste se répéta. De plus en plus régulièrement, Lothaire rentrait de la taverne bourré comme un coing. Chaque fois que cela arrivait, la violence du Garde n'avait d'égal que la passion qui l'avait animé à leur rencontre. Comment avait elle le coeur à ne pas s'enfuir ? Comment pouvait elle se laisser ainsi faire ? Encore aujourd’hui, elle l'ignore. Le mari attentionné avait bien changé, pourtant lorsqu'il était sobre, il était tout à fait correct avec elle. Il abritait désormais un monstre. Un monstre qui se réveillait lorsque la douce chaleur de la boisson remplissait son gosier. Nul ne sait si elle aurait pu supporter ce manège encore longtemps ou si elle aurait fini par succomber aux coups de son mari, car l'impensable se produisit un jour. Il était rentré bien plus tôt, ce jour là, enivré comme à son habitude, elle n'y faisait plus attention. Et puis sans plus de cérémonie, il lui avait asséné un coup violent dans le ventre, obligeant la jeune femme à s'asseoir sur le divan pour reprendre son souffle. C'est là qu'il l'outragea. L'acte de trop, alors qu'il se fut assoupi, Athina, encore marqué de violet et de rouge de ce qu'elle venait de vivre, sorti de la demeure et se présenta dépenaillée à un garde de la cité. Un garde qui compris immédiatement la situation d'un simple coup d'oeil. Le cauchemar pris fin lorsque, au tribunal, le juge condamna son désormais ex mari à cinq ans d'emprisonnement.

Difficile de retrouver goût à la vie après une telle épreuve. En réalité, une partie d'elle est morte ce jour là. Heureusement pour elle, ce qui est né de cet acte ignoble est infiniment plus beau que cette parcelle perdue. Echo. Sa fille. Durant sa grossesse, il faut bien admettre qu'Athina se demanda longuement comment elle pourrait aimer ce parasite, fruit d'un viol. Elle songea plus d'une fois à mettre un terme à cette folie. Pourtant elle ne pu s'y résoudre, et à l'instant où elle posa les yeux sur ce petit coeur, toute mauvaise pensée s'envola aussitôt. Athina accoucha dans la forêt. C'est étrange, elle le savait, mais elle tenait à mettre au monde son enfant dans un endroit où elle se sentait à l'abri, en sécurité. C'est sa mère qui mis au monde la petite, bien qu'elle ne connaissait pas les circonstances de sa conception. Athina avait préféré lui éviter tant de peine, c'était inutile. La jeune femme mis plusieurs années à se reconstruire, sa fille l'y aidant grandement. Elle devint très solitaire, faisant des crises d'angoisse dans de trop grandes foules. Se servant de ses compétences dans le domaine, elle décida de faire de sa passion son métier et se mis à chasser animaux comme créatures, pour manger ou par contrats, et d'ensuite en vendre les ressources. Elle apprit à tanner les peaux, à tisser la laine. Et puis elle rencontra un homme qui allait changer sa manière d'appréhender la vie. Elle le trouva un jour, pouilleux, à demi mort dans un caniveau. Aussitôt, l'image d'elle quelques années plus tôt lui revint en tête, et elle passa son chemin. Pourtant, elle fit rapidement demi tour. On ne lui avait pas tendu la main après ce qui avait bouleversé sa vie, elle se fit la promesse de ne jamais laisser quelqu'un en détresse à son triste sort. Et pour avoir fini dans cet état, le sort d'Ilclaste n'avait pu être que triste. Il lui réapprit à appréhender une présence quotidienne, bien que la crainte l'avait parfois envahi qu'il ne puisse s'en prendre à son enfant. Ce qu'il ne fit jamais, d'ailleurs. Mais cette présence aida Athina à se reconstruire. Il n'était pas un amant, pas tout à fait un ami, ni un étranger. Il était devenu quelque chose d'autre, de spécial. Une âme meurtrie, comme la sienne, nécessaire à sa survie. Ils ne se confièrent jamais sur leurs épreuves passées, trop pudiques peut être, ou par crainte d'être rejeté par l'autre. Toujours est il qu'il est désormais une part importante de la vie de la jeune femme. Elle est très fière d'avoir réussi à affronter ses angoisses pour apporter son aide à une personne dans le besoin.